Toutes les semaines, nous publierons 2 extraits du Livre Blanc des pupilles de la Nation de la Fnapog   (Féderation Nationale Autonome des Pupilles de la Nation Orphelins de Guerre.)

Mon père, René Clay « Mort pour la France » !

 

La dernière semaine de mai 1940, les restes de l’armée française livrent la grande bataille du sud de Lille ; le pont de l’Abbaye-prison est la dernière porte de sortie des unités françaises qui tentent de stopper l’ennemi pour le repli des troupes anglaises vers Dunkerque.
Le 27, sonne le glas, mon père, 31 ans, y trouve la mort, pour le service de l’administration pénitentiaire où il est gardien, non loin de notre domicile à Loos lez Lille (59).
J’avais 4 ans 3 mois, nous étions 4 garçons âgés de 6 mois à 9 ans à la charge de notre mère veuve à 28 ans.

Je n’ai que de vagues souvenirs de cette époque sinon que nous avons rejoint le domicile de nos grands-parents maternels à Saint-Omer (62), distant d’environ 80 kilomètres, sous les bombardements et routes encombrées, à bord d’une bétaillère conduite par son propriétaire, ami de mon grand-père qui était à bord.

C’est plus tard que j’ai compris, on ne le peut à cet âge, on ne s’en rend pas compte mais on sent qu’il y a une grande douleur ? « Un enfant a besoin de ses deux parents » !

C’est après que j’ai souffert de cette perte, un père c’est un support, sur qui on peut compter, s’appuyer, être conseillé et protégé. Je n’ai pas eu droit à cela, on me l’a pris.

A Saint-Omer, la maison n’est pas grande, il n’y a qu’une chambre, le grand-père laisse sa place à sa fille et couche au grenier avec le frère aîné, que je rejoins peu de temps après.

Ma mère, trouve un travail de lingère à domicile, qu’elle fait malgré toutes ses charges familiales.

Ma grand-mère, s’occupe du ménage, des repas, du poulailler, de la chèvre pour le lait.

Le grand-père, ancien combattant de la première guerre mondiale, à l’âge de la retraite reprend ses activités dans les marais audomarois jusqu’à sa mort à 72 ans en 1950.

L’autre grand-père, revenu gazé de cette même guerre, meurt le jour où il apprend celle de son fils.

Je m’en suis sortie car avec la volonté on s’en sort toujours, j’ai manqué bien souvent l’école pour aider la famille et particulièrement le grand-père.

A 14 ans, je suis embauché à la même fonderie que mon frère aîné, je vais aux cours du soir pour le CAP que j’obtiens. Je suis resté dans ce métier comme mouleur-noyauteurs jusqu’à mon départ en 1956, pour le service militaire.

Je n’ai jamais manqué une cérémonie patriotique et chaque fois que j’ai pu, c’est à Saint-Omer que je suis allé déposer une fleur au monument aux Morts où le nom de René Clay est gravé sur le marbre, mais aussi d’autres fleurs sur les tombes de mes aïeux.

Et maintenant, 86 ans dans quelques jours, je suis toujours membre de l’ONACVG comme pupille de la nation orphelin de guerre et ancien combattant ou à ce titre je perçois la retraite du combattant depuis l’âge de 65 ans, qui m’a été attribuée sans tri ni choix sélectif, ce qui n’est pas le cas des pupilles de la nation orphelins de guerre où une sélection faite par les décrets des années 2000 et 2004 en a oublié beaucoup et je suis de ceux-là ! Et en attente ?

Fait à Mazingarbe, le 17 janvier 2022.

                Serge Clay, pupilles de la nation orphelin de guerre, ancien combattant,

                27bis, rue Raymond Dupuich, 62670 Mazingarbe.

               

 

 

 

 

 

 

 

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