SENAT M. Folliot

 Pupilles de la Nation non éligibles aux décrets du 13 juillet 2000 et du 27 juillet 2004

15e législature

Question écrite n° 23655 de M. Philippe Folliot (Tarn – UC)

publiée dans le JO Sénat du 08/07/2021 – page 4211

  1. Philippe Folliot attire l’attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants, au sujet des demandes des associations de pupilles de la Nation qui souhaitent un traitement pour les personnes non éligibles aux décrets n° 2000-657 du 13 juillet 2000 et n° 2004-751 du 27 juillet 2004. Ces associations estiment que ces deux décrets créent un préjudice en excluant de leur champ d’application une partie des victimes des guerres, notamment celles de 39-45 ainsi que celles des conflits indochinois et algérien, en précisant qu’ils visent spécifiquement les victimes de la Shoah et celles de la barbarie nazie. Tout en affirmant le caractère particulier des crimes et violences perpétrés pendant la Seconde Guerre mondiale, et dont ces décrets sont la reconnaissance, ces associations souhaiteraient transmettre la requête des pupilles de la Nation, concernant la réparation qu’elles estiment leur être due. Elles considèrent que le décret de 2004 rompt avec l’unité de statut des orphelins de guerre prévu par la loi du 31 juillet 1917, et créent de cette manière un sentiment de désarroi chez les pupilles se retrouvant exclus de certaines réparations. Ces associations appellent de leurs vœux un nouveau décret concernant les enfants pupilles qui n’ont pas été retenus par ceux de 2000 et 2004. Ainsi, il souhaiterait connaître son avis sur la mise en place d’une réparation pour les pupilles non concernées par ces décrets.

 

Réponse du Ministère auprès de la ministre des armées – Mémoire et anciens combattants

publiée dans le JO Sénat du 05/08/2021 – page 4885

L’indemnisation, mise en place par les décrets n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale, est plus particulièrement destinée aux victimes de la barbarie nazie. Cette dernière renvoie à une douleur tout à fait spécifique, celle d’avoir perdu un père ou une mère, ou parfois les deux, dans un camp d’extermination. C’est en effet le caractère hors normes d’extrême barbarie propre à ces disparitions spécifiques à la Seconde Guerre mondiale, le traumatisme dépassant le strict cadre d’un conflit entre États, ainsi que la complicité du régime de Vichy, comme l’a rappelé le Président de la République, qui sont à l’origine de ce dispositif réservé aux enfants dont les parents, résistants ou ayant fait l’objet de persécutions antisémites ou raciales, incarnant des martyrs, sont décédés en déportation ou ont été exécutés dans les circonstances définies aux articles L. 342-3 et L. 343-5 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG). Ce dispositif, qui traduit une certaine responsabilité de l’État français, doit rester fidèle à sa justification essentielle qui est de consacrer solennellement le souvenir des victimes de la barbarie nazie, à travers leurs enfants mineurs au moment des faits. Le Gouvernement entend maintenir cette spécificité pour ne pas porter atteinte à la cohérence de ces décrets. Il connaît toutefois les difficultés subies par les pupilles orphelins de guerre ou du devoir. Aussi, lorsque l’examen de plusieurs dossiers laisse apparaître la difficulté d’appliquer des critères stricts permettant de distinguer des situations extrêmement proches, le ministère des armées s’attache à étudier les dossiers concernés au cas par cas, afin de garantir une égalité de traitement, tout en confirmant la nécessité de préserver le caractère spécifique de cette indemnisation dont l’extension à tous les orphelins de guerre ne saurait être envisagée. Enfin, il est précisé qu’ainsi que le prévoit le CPMIVG, tout orphelin de guerre peut percevoir, ou a pu percevoir, une pension spécifique jusqu’à son 21ème anniversaire. En outre, les orphelins de guerre et pupilles de la Nation, quel que soit leur âge, sont ressortissants de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre et peuvent bénéficier, à ce titre, de l’assistance de cet établissement public, dispensée notamment sous la forme d’aides ou de secours en cas de maladie, absence de ressources ou difficultés momentanées. Ainsi, le montant total des aides qui leur a été accordé est passé de 1 350 000 € en 2010 à 4 763 042 € en 2020, soit une augmentation de 283 % en 10 ans. En 2020, l’ONACVG a accompagné financièrement 1 111 pupilles majeurs en difficulté financière, ces aides étant réservées aux plus démunis. Une priorité est par ailleurs donnée à l’accompagnement des pupilles mineurs dont le nombre a sensiblement augmenté depuis 2015, passant de 200 à 966 pupilles de moins de 21 ans. Des estimations concernant le recensement de cette population ont été réalisées, en 1998, 2007 et 2014, sur la base notamment des pensions d’orphelins accordées par la sous-direction des pensions du ministère des armées. Leur nombre est estimé à 26 000. Une nouvelle étude qui permettra de mettre à jour les dernières estimations de 2014 est actuellement en cours au sein du contrôle général des armées. Cette estimation ne constitue cependant pas un recensement exhaustif, dans la mesure où un tel recensement, qui supposerait la mobilisation de moyens importants et poserait des questions de confidentialité des données, ne semble pas nécessaire.

 

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