mardi 11 novembre 2025 Région I Lorraine
Le REPUBLICAIN LORRAIN
GRAND EST
11-Novembre : faut-il modifier le discours de la ministre en Alsace-Moselle ?
Nicolas Roquejeoffre
Au mémorial du Linge, des soldats alsaciens ou mosellans ont combattu du côté allemand.
Photo Cédric Joubert
La question revient chaque année à l’approche des cérémonies du 11-Novembre : le discours officiel doit-il prendre en compte la réalité de l’histoire de l’Alsace et de la Moselle, territoires allemands durant la Première Guerre mondiale ? La députée Brigitte Klinkert et le maire de Zimmerbach, Benjamin Huin, ont demandé à la ministre des Armées de mentionner cette singularité. Ils n’ont pas été entendus.
Sur le dossier hautement symbolique de la reconnaissance mémorielle, la députée Brigitte Klinkert adopte la politique des petits pas. Le dévoilement par le Président de la République, ce 11 novembre, d’une plaque rendant hommage aux incorporés de force dans l’armée allemande du IIIe Reich est l’aboutissement d’un inlassable travail de persuasion.
Soutenue par le Souvenir français et son président Serge Barcellini, la parlementaire haut-rhinoise a réussi à convaincre l’Elysée du bien-fondé de cet hommage « tant espéré et tant attendu », écrit-elle dans un courrier adressé le 24 octobre à la ministre des Armées, Catherine Vautrin. Lettre cosignée par le maire de Zimmerbach, Benjamin Huin.
Les deux élus avaient déjà rédigé ensemble une tribune publiée dans le journal Le Monde le 24 août 2024. Ils demandaient une action
mémorielle sur l’Alsace-Moselle, sur l’annexion de fait durant le dernier conflit mondial, mais aussi sur la Première Guerre mondiale. C’est justement l’objet de cette missive adressée à la ministre.
Lors de la cérémonie du 11-Novembre qui, rappelons-le, n’est plus uniquement dédiée aux soldats tombés en 14-18 mais, depuis 2012, à tous les « morts pour la France », est lu un message ministériel. En Alsace et Moselle, certains maires s’en affranchissent ou complètent le texte par une seconde prise de parole rappelant la spécificité des trois départements devenus allemands par le traité de Francfort en 1871. Les jeunes Alsaciens et Mosellans ayant combattu durant la Première Guerre mondiale et dont les noms peuvent figurer sur les monuments aux morts étaient des Feldgrauen. Selon l’historien Raphaël Georges, auteur d’une somme sur le sujet (*) quelque 300 000 hommes ont ainsi été mobilisés, 37 480 sont décédés. Près de 18 000 Alsaciens-Mosellans avaient rejoint l’armée française.
• << La mémoire de la France est plurielle >>
Pour Brigitte Klinkert et Benjamin Huin, « le message ministériel lu en Alsace-Moselle ne correspond pas à cette réalité historique et ne contribue pas pleinement au travail mémoriel en cours dans notre région ». Les signataires ont ainsi demandé à la ministre de mentionner la mémoire de ces victimes dans son message et lui ont fait une proposition d’ajout. Le discours a été diffusé ce vendredi 7 novembre et leur proposition n’a pas été retenue. Comme l’an dernier, il y est juste fait mention des incorporés de force : rien sur les anciens combattants alsaciens-mosellans de Guillaume II.
« Notre Nation est Une et l’Alsace est attachée à la France, mais le pays devrait prendre en compte notre histoire singulière », estime Brigitte Klinkert. « La mémoire de la France est plurielle, ajoute Benjamin Huin.
Je ne comprends pas cet entêtement de Paris, qui devrait reconnaître la diversité de notre histoire. »
(*) Un nouveau départ. Les vétérans alsaciens-lorrains dans la France d’après-guerre (1918-1939) par Raphaël Georges, éd. Presse universitaire de Rennes, 26 €.
« Le message ministériel lu en Alsace-Moselle ne correspond pas à cette réalité historique et ne contribue pas pleinement au travail mémoriel en cours dans notre région »

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