dimanche 20 août 2023

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MEURTHE-ET-MOSELLE

Pexonne : les descendants du responsable de la rafle du 27 août 1944 seront là .

Frédéric Plancard

C’est devant l’église de Pexonne que les victimes de la rafle ont été rassemblées le 27 août 1944. Photo Fabrice Labarre

C’est probablement une première en France : les petits-enfants du capitaine SS Wenger, responsable de la rafle du 27 août 1944 dans le village du Lunévillois, seront présents lors de la commémoration du drame. Ils souhaitent demander pardon aux familles de déportés. Un événement.

C’est sans doute une première en France. Et elle aura lieu Pexonne, petit village du Lunévillois à la limite des Vosges, théâtre le 27 août 1944 d’une rafle ordonnée par le capitaine SS Erich Wenger.

79 ans plus tard, le dimanche, 27 août 2023 à 9 h 45, trois petits­ enfants du capitaine Wenger seront présents à cette commémoration.

Sur leur demande.« Une petite-fille m’a envoyé un message Facebook disant qu’ils aimeraient assister à une commémoration pour demander pardon pour tout le mal qu’il vous a fait », explique Guillaume Maisse, auteur du livre Pexonne, 27    août 1 944. La rafle oubliée. Ouvrage qui a permis le contact entre l’auteur qui souhaitait retrouver la famille du capitaine Wenger. « Ce sont eux qui m’ont retrouvé ». Ils pourront donc, comme ils le souhaitent, « exprimer leur compassion aux familles de déportés », comme écrit dans l’invitation à cette cérémonie.

Guillaume Maisse a créé en 2017 l’association « Pexonne, 27 août 1944. Histoire et Mémoire » forte d’une centaine de membres, rassemblant, entre autres, des descendants des victimes de la rafle qui a fait 112 otages dont trois fusillés. Une vingtaine ont été libérés sur l’insistance de la sous-préfecture de Lunéville. Les autres ont été déportés d’abord vers le Struthof puis vers Dachau et enfin Mauthausen. Une quinzaine d’entre eux seulement reviendront vivants. « Ça a été un drame pour le village. Il y a eu, à Pexonne, 32 veuves et 84 orphelins », précise-t-il.

La venue des petits-enfants du capitaine Wenger, « je le vis bien », confie-t-il. Même sentiment pour les membres de l’association : « Je leur ai fait lire le message Facebook. Quand vous lisez ça, ça vous donne la chair de poule. Personne n’a dit qu’il ne fallait pas les recevoir. On les accueille avec plaisir ». Guillaume Maisse espère même « tisser des liens » forts et pérennes entre eux et le village de Pexonne. Lui, dont le grand-père a été raflé et est mort à Mauthausen.

« Mon grand-père m’a énormément manqué. J’aurais rêvé d’un grand-père en pantalon de velours qui m’aurait emmené à la pêche aux écrevisses », témoigne-t-il. « Ma mère a épousé un professeur d’allemand et très jeune j’allais en Allemagne. Je n’ai pas de rancœur ».

Chaque année, Guillaume Maisse assistait aux commémorations et « je me demandais qui était le responsable de la rafle ». En 2013, il s’aperçoit que rien n’a été écrit sur ce drame. Il n’est pas historien mais s’attelle à la tâche. Ecume tous les dépôts d’archives en France comme à l’étranger. Et recolle les morceaux.

Erich Wenger, capitaine SS est « quelqu’un d’excessivement brillant en poste à l’ambassade d’Allemagne à Paris. Il a été placé là par Himmler pour surveiller l’ambassadeur Otto Abetz ». Le 17 août 1944, il quitte Paris pour rejoindre Berlin. Mais « le 20 août, à Nancy, il reçoit un contre-ordre ». Il doit constituer un Kommando pour « nettoyer le secteur de Baccarat » où se trouvaient des maquis, des parachutistes anglais et des Jeunesses hitlériennes qui creusaient une tranchée antichar. Aidé d’auxiliaires français, le capitaine Wenger apprend « qu’il y a des choses à Pexonne. Les maisons sont fouillées, les hommes sont emmenés sur la place devant l’église ».

  • Embauché par les services secrets

 Après la guerre, Wenger bénéficie de trois non-lieux en France et devient « conseiller auprès du gouvernement fédéral pour les questions de contre-espionnage ». Il est même convoité par les Américains. « Il a aussi fait assassiner des parachutistes anglais », poursuit Guillaume Maisse. Un procès s’ouvre en 1947 à Londres mais il est « interrompu et ne sera jamais repris ». En 1963, un journaliste du quotidien allemand Der Spiegel « révèle que les services secrets allemands sont dirigés par d’anciens nazis ». Wenger est alors muté aux sépultures militaires et ne sera pas inquiété jusqu’à sa mort en 1978.

Une des filles d’Erich Wenger, Ute, « s’est fâchée avec son père. Du côté de sa mère, elle avait un grand-père réfractaire au national­ socialisme qui a refusé d’adhérer au parti nazi, le NSDAP. Et elle s’est mariée avec un Français en 1966 ».

L’histoire de cette rafle, Guillaume Maisse souhaite la raconter autrement : « J’ai le projet de monter une pièce de théâtre qui serait le procès de Wenger », révèle-t-il.

En attendant, il fait traduire son livre en allemand dans le but de donner des conférences sur Pexonne en Allemagne. L’an prochain, il ira à Melk en Autriche pour en parler à l’occasion de la commémoration de la libération des camps.

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