Résistant à 12 ans

Né le 9 juillet 1931 à CERANS-FOULLETOURTE (Sarthe) Jean-Jacques AUDUC le plus jeune résistant de France est décédé le jeudi 24 Août 2017.

Sa mère Renée, titulaire du Brevet Supérieur en 1930, était secrétaire dans un organisme agricole et de ce fait avait accès à des « tampons » pour établir de faux papiers pour les aviateurs récupérés dont 5 américains restés 5 jours à la maison. Ma mère avait indiqué sur les papiers qu’ils étaient sourds et muets afin que les feldwebels ne les questionnent pas. Jean Jacques les a même convoyés pour les faire sortir de la zone du Mans en ayant la peur qu’ils ne parlent, mais finalement tout s’est bien passé.

Son père est chargé de récupérer les aviateurs alliés tombés en mission, puis de les exfiltrer via une filière bien organisée. Il est aussi agent de liaison, il utilise à ces fins une moto.

Un jour, à la frontière belge, il est témoin d’un massacre perpétré par les nazis dans un couvent qui abrite un orphelinat où se trouve une centaine d’enfants confiée à des sœurs. Deux mitrailleuses sont installées et les enfants, les sœurs, le jardinier, le curé sont abattus froidement par un bataillon de la division Das Reich qui veut établir son QG dans ce lieu.

Ces faits horribles ont décidé son père à entrer dans la résistance. Fait prisonnier alors qu’il circulait à moto, le gendarme allemand lui montre sa propre moto qu’il dit « kaputt » et lui demande s’il peut prendre la sienne. Son père n’y voit bien sûr aucun inconvénient, car prisonnier, et peu de temps après l’allemand revient et lui remet un paquet contenant des vêtements civils, le père en déduit qu’il l’incite et l’aide à s’évader, ce qu’il fit.

Il tente ensuite de trouver un réseau de résistance pour l’intégrer. Il rejoindra le réseau « Sacristain » commandé par un certain Commandant FLOEGE1. A l’intérieur de ce dernier il forme son propre groupe « Fred » comprenant les membres de la famille : grand-mère, 2 oncles, sa femme et lui le gamin de 11 ans.

C’est la famille qui récupère aussi les parachutages, jusqu’à 3 tonnes d’armes et minutions.

1 ére mission :

Son jeune âgelui permettait de circuler assez librement. Il sera la boite aux lettres du réseau. Il va donc transmettre les messages et pour cela il se rend à l’hôtel de la Calandre Au Mans malgré les routes barrées. Le ou les messages étaient dissimulés dans un radiateur hors service et spécialement aménagé. La réponse au message était à l’identique. Comme il utilisait son vélo il cachait le message dans la pompe à bicyclette, mais cette pompe fut perdue à un moment et la cache message devint le guidon.

2 éme mission :

Il lui faut se renseigner, à la demande des anglais, sur un terrain d’aviation où paraît-il sont stationnées 3 escadrilles de Messerschmitt repérées par un avion britannique. Prenant son cerf- volant le voilà parti jouer aux alentours du terrain duquel il s’approche peu à peu, même un soldat allemand, un « vieux soldat » de la Whermacht s’amuse avec lui. Il en profite pour bien regarder les avions et s’aperçoit que ce sont des leurres en bois ou carton. Il signale ses observations aux anglais qui, vont bombarder le terrain avec des bombes en…bois informant ainsi les allemands que leur supercherie est découverte (peut-être de l’humour anglais).

Novembre 1943 :

Ses parents sont arrêtés, lui non car il était parti en mission chez la grand-mère2. Une de ses voisines l’attendait pour lui dire ce qui était arrivé et qu’il lui fallait s’éloigner. C’était prévu et il part se réfugier à Chartres chez un colonel appartenant au réseau. Ce dernier le dirigera ensuite à Paris où un contact doit l’attendre.

Arrivé à la gare Montparnasse, personne n’est là (il apprendra plus tard l’arrestation de ce contact). Un porteur de la gare voyant son désarroi l’aborde, lui parle et le garçon lui raconte l’essentiel, non sans appréhension ne sachant à qui il s’adresse. Ce porteur du même pays que JEAN JACQUES l’héberge chez lui une seule nuit car étant nouveau marié il ne pouvait faire plus. Il lui indique une autre adresse à Paris où il se rend, récupéré ensuite par les anglais.

Message radio diffusé par la BBC :   J J bien arrivé chez les amis marchands de couleurs. Indiquant par là au réseau qu’il était sain et sauf.

 

Pour vivre ou plutôt survivre il exerce plusieurs métiers : marchand de couleurs à Montmartre, promeneurs de chiens de vieilles dames, quelques services au zoo de Vincennes, faire la queue pour les tickets de rationnement et il finira chez les dames de petites vertus comme on les nomme. Elles l’héberge, le nourrisse et lui sauve en réalité la vie.

A la libération il sera choqué de voir des résistants de la dernière heure, armés d’un fusil, humiliant ces filles.

Que sont devenus ses parents ? 

Début 1944 :

Son père ira à BUCHENWALD d’où il reviendra ne pesant que 35 ou 36 kilos. Il avait établi une différence entre un soldat allemand et un nazi dans ce qu’il avait vu au début.

Sa mère envoyée à RAVENSBRÜCK, camp de femmes. Vendue 170 marks aux laboratoires BAYER pour expériences. Libérée par les américains elle transitera par les Pays Bas pour revenir chez elle faible, très éprouvée et malade. La pénicilline qu’on lui administre ne la sauvera pas et décédera à 41 ans, quelques mois après son retour.

Un de ses oncles périra à MAUTHAUSEN, l’autre reviendra en France.

Ils appartenaient au réseau « Hercule Sacristain Buckmaster».

Deux tantes seront emprisonnées.

Quant à Jean Jacques seul avec son père il ne peut suivre des études il lui faut travailler pour nourrir sa famille restante. Cependant il suivra par correspondance des cours de sylviculture.

Jean Jacques AUDUC devant des élèves

 

Il sera décoré de la Croix de Guerre à 15 ans par le Général De GAULLE.

Un livre “le petit messager à bycyclette” a été édité narrant son histoire.

 

Notes :

1°) FLOEGE (1898-1996) agent secret américain au service du SOE Britannique. 2 missions en France : Au Mans en 1943 et dans le DOUBS en 1944.

2°) C’est chez elle que se trouvait un poste émetteur-récepteur dont de servait « Hercule » du réseau, pour correspondre avec Londres et qui a même servi aussi à FLOEGE qui avait perdu son « radio ».

 

Sources : revue Histoire, sites internet et chaine TV.

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