LADEPECHE

  Gers
Publié le 27/12/2018 à 07:53
Il y a 100 ans, des fêtes de Noël et de Nouvel An au goût très amer
Noël et Nouvel an – Regard

Au moment de Noël, même les cartes postales restent encore sur des thèmes très patriotiques et revanchards./ Photo repro, DDM
 
Voilà un peu plus de cent ans, toutes les cloches des églises et cathédrales de France annonçaient la fin de la guerre. Noël et nouvel an 1918 : comme partout sans doute, le Gers exsangue de ses forces vives n’a pas eu le cœur à la fête.
11 novembre 1918 : la paix après quatre années d’une terrible guerre. A l’heure de Noël ou du Nouvel An, l’on aurait pu croire que la liesse et le partage auraient envahi tous les départements, toutes les communes de France. Mais la France, il est vrai vidée de son son sang, semble rester meurtrie, abasourdie, quasi silencieuse. Le Gers – peut-être plus qu’ailleurs – a payé un lourd tribut (cf. le chiffre).
Alors, quid des fêtes de fin d’année dans le Gers ? : rien à signaler… ou presque. C’est en tout cas l’impression que donne la lecture de la presse locale du moment : La Dépêche du Midi, La République du Travailleurs, la Semaine religieuse.
C’est ce qu’a pu constater Laurent Mauras, de la société archéologique, qui s’est rendu aux archives départementales pour «nous».
Il constate : «La presse ne parle pas plus des soldats en ce temps de festivités que d’ordinaire. Ce qui ne veut pas dire que les familles les oublient, bien au contraire. Hélas, les premiers bilans sont faits : les prisonniers (rentrés ou pas encore), les blessés (décompte inachevé), les morts (surtout).»
Laurent ajoute : «On pense aux soldats gersois de manière générale, surtout s’ils sont en Lorraine, territoire reconquis. Donc, la presse parle plus de la Lorraine que des soldats qui y sont. Seule la presse religieuse y fait plus allusion au moment de la préparation des messes de Noël…»
Ainsi, un numéro précédant Noël de la Semaine religieuse souligne : «On nous a demandés si, eu égard aux circonstances, on devait faire l’office de minuit dans nos paroisses. Nous ne voyons pas quelles circonstances pourraient s’y opposer.» En revanche, la lecture des coupures de presse nous apprend aussi que les conseils municipaux (Lavardens, Jegun…) votent rapidement des crédits pour ne pas oublier les morts de la commune en érigeant des monuments à leur mémoire.
La lecture attentive des articles parus entre Noël et Nouvel An a toutefois permis à Laurent Mauras de repérer une commune où un bal est organisé en présence des «soldats, permissionnaires, rapatriés d’Allemagne et autres» : il s’agit de Fleurance. La soirée dansante avait été organisée dans la salle du café Duclos et mœurs du temps obligent, il était précisé : «Ces braves compatriotes nous prient d’informer toutes les jeunes filles et les jeunes de la ville et des environs que l’accueil le plus cordial leur sera réservé».
Cléricaux et laïques
Dès la fin de la guerre, la querelle religieuse reprend son plein entre laïcs et cléricaux. Le clergé – poussé par le Pape avec les évêques en relais, multiplient les initiatives. Quelques extraits choisis
dénichés dans la Semaine religieuse : «Parents avisés et soucieux de la moralité de vos enfants ne négligez pas de les envoyer au catéchisme… et vous ne vous exposerez pas à les voir gâcher leur vie et déshonorer vote nom.» Plus bas dans la même édition : «Ils ne désarment pas : Nous pensions que la fraternité d’armes qui avait placé côte à côte le prêtre et l’instituteur aurait créée une fraternité durable dans leur vie d’apostolat». Dans une autre édition proche de Noël : «Nous voulons espérer que l’instituteur, celui qui touche de plus près au réel des choses, se souviendra d’un passé qui doit survivre dans l’avenir ne tiendra à marcher la main dans la main avec le prêtre qui a, comme lui, plus que lui, le sacerdoce de l’enfance».
Le chiffre : 8 000
morts environ >en 4 ans. C’est le tribut payé par le Gers. Plus de 35 000 Gersois ont été mobilisés : 3 604 ont été blessés ou mutilés. Le Gers compte 2 341 veuves et 2 933 pupilles de la Nation.
Serge Boulbès
 

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