Les deux nouvelles stèles érigées portent désormais le nom de 63 des résistants fusillés. D’autres patronymes, qui restent à découvrir au fil des recherches, y auront également leur place. 
Anomalie. Injustice. Fabrice Brogi, le maire d’Auboué – la commune a vu plusieurs de ses enfants tomber sous le peloton d’exécution allemand à la Malpierre – n’y va pas par quatre chemins pour exprimer l’anonymat qui, durant près de 80 ans, a pesé sur ce lieu de mémoire.
Jusqu’à ce samedi 28 septembre 2018, le nom des résistants fusillés n’était jamais apparu en lettres d’or même si le 15 septembre 1963, la première stèle (vierge) de la Malpierre s’érigeait au cœur de cette clairière gorgée de sang. Des bois où flotte toujours la présence de ceux et celles « qui, par leur courage et engagement, ont permis le triomphe sur la barbarie et le totalitarisme ».
« La singularité de ce lieu va cesser », poursuit Fabrice Brogi. « Trop longtemps, nous avons su que les nazis fusillaient ici sans savoir qui étaient ces hommes assassinés, même s’il reste encore à y joindre des noms manquants. Nous le saurons, désormais. Enfin. »
« Leur mémoire est aujourd’hui inscrite dans la pierre pour l’éternité, car oublier, ce serait trahir »
Associée pleinement à la cérémonie d’inauguration de ces deux stèles en granit breton, la vingtaine d’enfants de l’école Jean-Moulin de Champigneulles participait activement à la réussite de l’événement en présence d’un parterre de personnalités et associations patriotiques. Cités au micro par les écoliers, les noms des 63 fusillés – ponctué d’un « mort pour la France » – s’envolaient un à un vers la cime des arbres. Comme autant d’âmes apaisées.
Qu’ils soient venus d’Italie, de Suisse, de Hongrie, de Pologne… ; qu’ils aient été communistes ou gaullistes ; quelles que soient leurs origines nationales ou politiques, « ils sont morts en héros pour leur idéal de liberté et de fraternité et on pourra désormais lire leurs noms dans la lumière », soulignait Mathieu Klein, président du conseil départemental 54 chargé de la réalisation de ces deux stèles, « symboles de réconciliation entre les différentes mémoires ». « C’est plus qu’un monument aux Morts ; c’est un lieu vibrant de la détresse des condamnés et de leurs idéaux de liberté », soulignait Eric Freysselinard, préfet de Meurthe-et-Moselle, associant « devoir de mémoire » et « devoir de vigilance ».
Sénateur et ex-secrétaire d’État auprès du ministre de la Défense, chargé des Anciens combattants et de la Mémoire, Jean-Marc Todeschini rappelait quant à lui que « derrière chaque monument aux Morts, il y a des histoires d’hommes et de femmes qui ont fait don de leur vie pour la France. Leur mémoire est aujourd’hui inscrite dans la pierre pour l’éternité, car oublier, ce serait trahir ».
Fiers – la main sur le cœur pour certains à la lecture de leur prénom par le maître de cérémonie en guise de reconnaissance –, les enfants de Jean-Moulin n’oublieront sans doute rien de cette leçon d’histoire vécue samedi, en forêt de Haye, alors qu’on jouait le Chant des partisans.
Alain THIESSE

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