[vc_row][vc_column][vc_media_grid grid_id=”vc_gid:1525691128871-c74078abde63ac8a00317334ff6a7a0e-1″ include=”454,455,456″][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_column_text]

MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

Collection « Mémoire et Citoyenneté » n° 36 NN

Déportés condamnés à disparaître dans la nuit et le brouillard 

DIRECTION DE LA MÉMOIRE, DU PATRIMOINE ET DES ARCHIVES

 Lancée le 10 mai 1940, l’offensive du IIIe Reich en Europe occidentale impose à la Belgique, la Hollande, le Luxembourg, la Norvège et la France de vivre sous le joug de l’occupant : la résistance à l’envahisseur nazi et aux régimes en place s’organise dès les premiers mois.

L’intensification de la répression allemande à l’égard des opposants au nazisme en Europe occidentale est le contrecoup de l’offensive allemande contre l’Union soviétique : la campagne de Russie est déterminante pour comprendre la genèse du décret sur les prisonniers Nacht und Nebel (“Nuit et Brouillard”). Les troupes de la Wehrmacht mobilisées sur le front de l’Est ont quelque peu délaissé le front ouest : les Allemands sont ici la cible privilégiée des attaques de la Résistance, notamment des communistes en réaction au pacte germano-soviétique bafoué. Hitler, obsédé par l’idée de ne pas lutter sur deux fronts, veut maintenir l’ordre dans les pays conquis de l’Ouest pendant qu’il attaque son ennemi de l’Est.

Dans un premier temps, les sanctions contre ces actions de résistance jugées illégales sont sans équivoque : leurs auteurs font l’objet de poursuites et sont condamnés soit à mort, soit à de lourdes peines de prison purgées en Allemagne. Toutefois, ces poursuites n’ont pas le résultat escompté : les condamnés à mort deviennent des martyrs, tandis que procès, peines de prison et peines capitales contribuent à renforcer les cohésions nationales et la volonté de résistance. Aussi, Hitler envisage d’adopter d’autres mesures à l’encontre des résistants occidentaux.

C’est en France, au cours de l’été et de l’automne 1941, que Hitler trouve le prétexte politique pour justifier de nouvelles mesures. Peu de temps après l’offensive allemande contre l’Union soviétique, une série d’attentats vise en effet des soldats et des installations de la Wehrmacht, l’armée allemande, sur le sol français.

La réflexion du Führer aboutit à la publication des décrets dits NN (Nacht und Nebel Erlaß). Le premier, en date du 7 décembre 1941, est une suite de cinq directives rédigée par Hitler lui-même présentant les principes généraux de l’action à entreprendre : “Avec le début de la campagne de Russie, des éléments communistes et d’autres milieux germanophobes ont intensifié leurs attaques contre le Reich et contre la puissance occupante. L’étendue et le caractère dangereux de ces menées imposent, pour des raisons d’intimidation, les mesures les plus rigoureuses à l’égard de leurs auteurs“. Les deux autres, datés du    12 décembre et à l’initiative du maréchal Wilhelm Keitel, sont, d’une part, une réaffirmation de la volonté politique du Führer, d’autre part, une première ordonnance d’application. Ces trois textes constituent un ensemble indissociable instaurant un statut spécial pour tous les opposants à la force d’occupation qui représentent un danger pour la sécurité de l’armée allemande et constituent des ennemis du Reich : saboteurs, communistes, opposants politiques, responsables de réseaux, agents parachutés…

Ainsi, lorsque la police allemande arrête une personne soupçonnée d’entretenir des contacts “avec l’ennemi” dans l’un des cinq pays mentionnés, l’inculpé est traduit en justice dans son propre pays aux conditions que l’action judiciaire puisse être menée à son terme dans un délai de 8 jours et qu’une condamnation à mort soit prononcée  (art. 2). Si ces conditions ne peuvent être remplies, l’intéressé est secrètement déporté en Allemagne pour y être soit interné en attendant de faire l’objet de poursuites judiciaires, soit emprisonné dans un camp de concentration sous le sigle NN où il est condamné à mourir d’épuisement par le travail et les mauvais traitements. Les procès se déroulent à huis clos et, en cas de décès, la famille n’est pas avertie. Isolés de tout et de tous, les prisonniers NN, hommes et femmes, sont à la merci des autorités nazies, dans les geôles et les camps, à Breslau et Hinzert par exemple, dès la fin de l’année 1941.

Quant aux prisonniers français (la grande majorité des effectifs), ils sont déportés, dans un premier temps à Gross Rosen, mais aussi à Flossenbürg, à Buchenwald et à Hinzert. Ce n’est qu’à partir  de juillet 1943 que les premiers convois de prisonniers NN français arrivent au camp de Natzweiler. Situé près du lieu-dit “le Struthof”, sur le Mont Louise, dans le massif vosgien à quelque 50 kilomètres de Strasbourg, il est ouvert dès mai 1941. Lorsque Natzweiler est choisi comme centre de détention des prisonniers NN, une lettre datée du 23 septembre 1943 part de Berlin à destination des commandants de l’ensemble des camps de concentration allemands, ordonnant de “transférer immédiatement tous les détenus d’origine germanique à Natzweiler-Struthof”. Il est surnommé “l’Enfer d’Alsace” par les Anglais ou “le camp de la Fin” par les détenus.

Un débat anime les historiens sur l’origine des termes Nacht und Nebel et sur la genèse des événements qui se succèdent entre l’automne 1941, quand Hitler fixe l’adoption du décret, et le 7 décembre 1941, lorsque le maréchal Keitel y appose sa signature. Les initiales peuvent désigner plusieurs choses : Non Nemo (personne) ou encore Norge und Nederland (Norvège et Hollande) où la loi est d’abord appliquée pour être ensuite étendue aux Luxembourgeois, aux Belges et aux Français par ordonnance de Keitel, en juin 1943. Mais, c’est plutôt dans L’Or du Rhin, l’opéra de Richard Wagner, qui jouit de l’admiration de Hitler, que l’on trouve le sens communément admis de ce symbole : sur la scène, deux personnages dont l’un lance une malédiction à l’autre : Nacht und Nebel gleich ! (“Nuit et brouillard tout de suite !”) et aussitôt la forme humaine du personnage maudit disparaît dans une colonne de fumée.

Cette justification “mythologique” serait l’allégorie des conditions particulièrement épouvantables que subissent les prisonniers NN au camp de Natzweiler et dans d’autres lieux d’internement et de déportation. Au fondement de ce décret il y a, en effet, l’intimidation comme arme de dissuasion, méthode que Hitler pratique déjà (en Autriche, en Tchécoslovaquie et en Pologne). Le préambule du décret est très clair : face aux actes de résistance et d’opposition, un simple emprisonnement, même s’il s’agit de la réclusion à vie, est interprété comme “un signe de faiblesse”. Hitler exige la peine de mort ou “une mesure laissant la famille et la population dans l’incertitude quant au destin du coupable”. La déportation en Alsace annexée est l’un de ces moyens.

Dès leur arrivée au camp, les prisonniers NN sont distingués des autres prisonniers ; les lettres NN, aux couleurs vives, rouge ou jaune selon les catégories, sont peintes sur leurs vêtements, les exposant particulièrement aux sévices des gardiens SS ou des kapos, des prisonniers de droit commun désignés comme surveillants des déportés. C’est ce que le docteur André Ragot, survivant du camp du Struthof, appelle “la première déchéance”.

Les témoignages concordent sur le sort particulier réservé aux prisonniers NN, la mort, rarement évitable, par différents moyens : la faim, le froid ou la chaleur torride, la maladie, l’épuisement. D’une façon générale, tout était savamment pesé, calculé, pour abêtir, avilir et faire disparaître des hommes dont la seule faute était d’aimer et de défendre leur patrie contre l’occupant nazi. Ils sont soumis à un régime pénitentiaire particulièrement féroce : les rations alimentaires sont moindres que celles des autres détenus ; ils sont pendant très longtemps interdits de soins infirmiers ; les sévices sont permanents : coups gratuits, humiliations, jeux sadiques, exécutions sommaires après de fallacieuses accusations ; ils subissent les stations debout interminables sur les places d’appel ; aucune communication n’est permise avec leurs codétenus. De plus, ils sont employés à des travaux exténuants de terrassement, d’exploitation de la carrière de granit, d’excavation et de construction de la future Kartoffelnkeller, la “cave à pommes de terre”, ainsi nommée par les déportés qui ne savaient pas à quel usage serait destiné cet impressionnant bâtiment souterrain. Le sadisme est aussi poussé jusqu’à les faire accomplir des travaux totalement inutiles, mais harassants. Ces résistants meurent sans gloire ni sépulture, au nom d’une dignité niée.

Le 30 juillet 1944, dans le sillage de la débâcle allemande, et pour ne laisser aucune trace de ce processus d’extermination, la procédure Nuit et brouillard disparaît. Ordre est donné de supprimer les déportés NN. Le camp de Natzweiler est évacué peu avant l’arrivée des troupes alliées. La majorité des déportés est envoyée à Dachau. Quant aux camps annexes, certains subissent le supplice des “marches de la mort”, interminables pérégrinations qui entraînent le plus souvent le décès des déportés exténués et affamés. Au total, les historiens allemands qui, après la guerre, se sont penchés sur la question, estiment que sur les 22 000 victimes du camp de Natzweiler et de ses annexes, près de 7 000 sont des prisonniers NN déportés de France   (5 000 à 6 000), des Pays-Bas, de Belgique, du Luxembourg et de Norvège. Ceux qui en reviendront seront marqués à jamais, victimes d’un système où tout concourrait à déshumaniser des combattants de la liberté.

Le 9 mai 1945, à Berlin, le maréchal Keitel signe l’acte de capitulation de la Wermacht.

Entré dans l’armée en 1901, Wilhelm Keitel occupe principalement divers postes d’officier d’état-major durant la Première Guerre mondiale. Après la capitulation de l’Allemagne en 1918, il poursuit sa carrière militaire au sein de la nouvelle armée allemande, la Reichswehr, telle qu’elle est autorisée par le traité de Versailles.

Lorsque Adolf Hitler arrive au pouvoir, en 1933, et entreprend de reconstituer les forces armées, la carrière de Wilhelm Keitel progresse très rapidement. Nommé général de brigade en 1934, il devient chef de cabinet du ministre de la guerre et directeur du Wehrmachtsamt, chargé de la coordination des forces armées, l’année suivante.

En 1938, Wilhelm Keitel est nommé chef de l’Oberkommando der Wehrmacht (OKW – commandement suprême de la Wehrmacht) nouvellement créé. Le 22 juin 1940, il signe l’armistice franco- allemand à Rethondes. Nommé maréchal en juillet 1940, cet exécuteur zélé des ordres d’Adolf Hitler couvre de son autorité toutes ses décisions militaires ainsi que les mesures de terreur adoptées dans les territoires conquis, portant notamment sur l’exécution des commissaires politiques de l’Armée rouge, l’exécution des otages et les prisonniers NN. En dépit de plusieurs tentatives visant à un changement de personne au sommet de la hiérarchie militaire de la part des cercles dirigeants de l’armée et de l’état-major, il conserve son poste jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le 9 mai 1945, il signe la capitulation sans conditions de la Wehrmacht, sur ordre du chancelier-amiral Dönitz. En 1946, le tribunal international de Nuremberg le condamne à mort pour crime contre la paix, crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

30 janvier 1933    Hitler chancelier du Reich.

28 février 1933     Décret “Pour la défense du peuple et de l’État” : création de la procédure Schutzhaft (détention de sécurité) des Häftlinge (détenus) ; ouverture des premiers camps de concentration.

21 mars 1933  Ouverture du Konzentrationslager (KL) de Dachau pour l’internement des déportés “politiques”, opposants au régime.

Juin 1936   Structuration du système concentrationnaire, placé sous l’autorité suprême du SS Reichsführer Heinrich Himmler, chef de l’ensemble des polices unifiées du Reich.

Janvier 1937  Déclaration de Himmler annonçant aux cadres de la Wehrmacht qu’il y a 8 000 détenus dans les camps.

Mars 1938   Internement massif d’”asociaux” en KL. Rattachement (Anschluss) de l’Autriche à l’Allemagne.

12 mars 1938   Rattachement (Anschluss) de l’Autriche à l’Allemagne

Novembre 1938   Passage temporaire des effectifs des  KL  à 60 000 dont 16 000 Novemberjuden, juifs arrêtés et déportés après la “Nuit de Cristal”, premier pogrom nazi contre les juifs en Allemagne.

23 août 1939 Pacte de non-agression germano-soviétique. Attaque allemande contre la Pologne.

1er septembre 1939  Attaque allemande contre la Pologne.

3 septembre 1939 Déclaration de guerre de la Grande-Bretagne et de la France à l’Allemagne.

Printemps 1940  Offensive allemande contre le Danemark, la Norvège, la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas, la France.

15 mai 1940   Capitulation de l’armée néerlandaise. Capitulation de la Belgique.

28 mai 1940   Capitulation de la Belgique.

22 juin 1940   Signature de l’armistice franco-allemand à Rethondes.

Août 1940       Décret de Heydrich classant officiellement les KL en trois groupes, d’après les catégories de détenus et la sévérité de leur régime de détention : détenus éducables, détenus pour affaires graves, détenus non amendables.

30 novembre 1940  Alsace et Moselle officiellement rattachées au Reich.

Mai 1941  Ouverture officielle du camp de concentration de catégorie III de Natzweiler

6 juin 1944   Débarquement allié en Normandie.

22 juin 1941  Attaque allemande contre l’URSS.

7 décembre 1941 Attaque japonaise sur Pearl Harbor ; entrée en guerre des États-Unis

12 décembre 1941    Promulgation du Keitel-Erlaß ou Nacht-und- Nebel – Erlaß, décret Nuit et Brouillard, instituant une procédure judiciaire particulière “visant les éléments hostiles aux forces d’occupation” en France, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Norvège.

Avril 1942  Décret “Pour la défense du peuple et de l’État” : création de la procédure Schutzhaft (détention de sécurité) des Häftlinge (détenus) ; ouverture des premiers camps de concentration.

2 février 1943    Capitulation allemande à Stalingrad.

15 juin 1943   Arrivée d’un premier convoi de prisonniers NN norvégiens au KL-Natzweiler.

9, 12 et 15 juillet 1943  Arrivée des premiers convois de prisonniers NN français au KL-Natzweiler.

30 juillet 1944  Décret allemand “Terreur et sabotage” abrogeant le décret Nacht und Nebel.

15 août 1944 Débarquement allié en Provence.

Août-novembre 1944 Libération de la France et de l’Europe occidentale.

2 septembre 1944  Évacuation du camp de Natzweiler.

Fin mars 1945   Offensive alliée en Allemagne.

7 mai 1945   Capitulation allemande à Reims.

9 mai 1945   Capitulation allemande à Berlin.

 
Ministère de la défense
Secrétariat général pour l’administration
Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives 14, rue Saint-Dominique
00450 ARMÉES
[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][vc_masonry_media_grid grid_id=”vc_gid:1525691128959-52f57ea0ba38dbc34d0ee663a050ac24-8″ include=”460,461,462,463,464″][/vc_column][/vc_row]

Aller au contenu principal