Guy SÉNÉLAS témoigne sur Oradour sur Glane

Guy avec sa petite fille Manon dans le quartier de la gare , lieu de son enfance (photo Catherine Perrot)
Un gamin de 12 ans, habitant le quartier de la gare à Saint-Junien (Haute-Vienne), maintenant âgé de 93 ans souhaite, encouragé par sa petite-fille Manon Jastreb-Sénélas, apporter son témoignage sur la tragédie d’Oradour sur Glane.

photo Catherine Perrot
Déjà depuis plusieurs années il voulait raconter ce qu’il, avait vu de ce terrible massacre, mais tellement douloureux ces souvenirs qu’il n’arrivait pas à franchir le pas.
A chaque commémoration à Oradour, les pénibles moments resurgissaient. Il vit toujours dans sa commune de Saint-Junien, avec son épouse Andrée, malgré les problèmes liés à l’âge.
Donc le 9 juin 1944, veille du massacre, il habitait rue Emile Zola à Saint-Junien. A l’époque les loisirs des enfants se tenaient dans la rue avec les copains.
Mais ce jour-là, ils se sont arrêtés de jouer, de forts bruits de moteur les inquiètent. Il y a de quoi, ce sont les troupes allemandes qui arrivant en convoi, remontant vers la Normandie, renforcer leur armée soumise au débarquement du 6 juin. L’ensemble se gare aux alentours de la gare.

La gare de Saint-Junien en 1944
Les gamins n’éprouvent pas de peur particulière, ils voient des soldats simplement. Ces derniers s’installent et se préparent à prendre leur repas. Et quel repas : du pain blanc, rare pour la population de la ville. Un d’eux leur demande d’aller chercher du vin, ils ne comprennent pas. En plus on leur ordonne en hurlant « de dégager, de partir ». Ce qu’ils font, à cet instant la peur s’installe, ils se dispersent dans les rues. Mais voilà qu’un soldat suit Guy, le rattrape et lui dit en français « tu t’en vas, tu quittes la ville très vite et le plus loin possible ».
Le petit Guy narre cet incident à son père. Ce dernier prend la décision de l’envoyer chez les grands-parents à La Fabrique quartier de Saint-Brice sur Vienne. Guy, tout ému, se souvient de ce soldat, certainement un « malgré-nous » car il parlait bien français, et qui lui a peut-être sauvé la vie.
Ce soir du 9 juin, rien de spécial, sauf un communiqué du maire « La ville est sous le contrôle de la Wehrmatch, venue assurer l’ordre et rétablir les communications ferroviaires », à paraitre le lendemain dans le journal local « l’Abeille1 ». parution d’un « Avis » interdisant toute circulation automobile, sauf ravitaillement et médicale, sous peine de tir sans sommation.
Le matin du 10 juin, il y a de l’animation au grand hôtel de la gare de Saint-Junien. En effet, le général Lammerding a convoqué plusieurs personnages : Joachim Kleest second de la gestapo de limoges, son interprète Eugéne Patry, quatre miliciens de Limoges, la SIPO (police de sûreté) et surtout Adolf Diekmann2 tout ce monde investit une pièce de l’hôtel.

Adolf Diekmann
Une décision est prise, celle d’effrayer la population, de faire régner la terreur à titre d’avertissement au vu d’actes de résistance. Il faut détruire tout une population. Ce ne sera pas Saint-Junien, ville d’environ 10 000 âmes car la troupe est trop peu nombreuse, une seule compagnie du 3ème régiment « de Führer ».
Ce sera Oradour sur Glane seulement 1 400 habitants, un village tranquille facile à encercler.
A 13 h deux colonnes quittent Saint-Junien.
13 h 45 : Oradour sur glane est cerné. Le drame commence avec l’entrée en action du 1er bataillon du 4ème régiment de « Panzerdivision3 » de la division « Das Reich » la plus violente. Cela durera jusqu’à 22 heures.

Oradour sur Glane le 11 juin 1944, matin
Mais Guy de son refuge distant d’une quinzaine de km, voit beaucoup de fumée au loin, il ne sait pas que c’est Oradour
Ce seront 643 victimes qui seront dénombrées. (246 femmes, 207 enfants et 190 hommes).
Notes :
1°) fondé en 1881, censuré par l’occupant et remplacé en 1944, après les événements par le journal « Délivrance »
2°) Diekmann : né 18 décembre 1914. Il est le commandant du 1er régiment « Der Führer « et de la 2ème division SS « Das Reich ». Cette dernière est composée de volontaires et de « Volksdeutsche4 » des alsaciens/mosellans, incorporés de force. Il est tué en Normandie le 29 juin 1944.
3°) Division blindée, équipée de chars performants depuis 1935. (D’ailleurs, le Général de Gaulle, déplorait que l’armée française n’en soit pas dotée ou si peu).
4°) signifie « Allemand par le peuple ». Population ne vivant pas dans l’état mais qui est ou serait de culture allemande. Dès 843 des peuples germaniques prennent place en Europe de l’Est, Bohème, Hongrie, Silésie.
(Wolks ..wagen : voiture du peuple, populaire)
Sources : divers sites internet
NDLR : un grand merci à Guy pour son témoignage et à Manon sa petite-fille pour l’avoir épaulé.
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