Témoigne de Madame Jeanne Schuh

Cherbourg le 22 février 2024

Monsieur

En juin 1944, j’avais 16 ans et demi, je travaillais à la ferme chez mes parents à Fresville, commune entre Montebourg et Sainte-Mère Eglise

Dans la nuit du 5 au 6 juin, les avions ont largué les parachutistes et le lendemain matin nous, nous avons récupéré des parachutes. Les obus tombaient et le 8 juin vers 9 heures, ça continuait.
Nous sommes partis dans une tranchée, nous venions d’arriver quand 4 obus nous sont tombés dessus.

Mon père, tué sur le coup, une balle ayant traversé le cerveau, moi blessée au genou, ma sœur à la hanche, maman et le petit domestique aucune blessure.

Nous sommes partis chez les voisins, ils ne nous reconnaissaient pas, pleins de feuilles, terre et etc…

Ils ont cherché des infirmiers américains, nous avons été bien soignées et sommes restés 2 ou 3 jours chez ce voisin, les obus tombaient et le voisin a voulu que l’on parte en voiture à cheval, allongées sur un matelas, nous avons fait 4 à 5 kilomètres et un châtelain nous a bien reçues.

Nous sommes restés 4 à 5 jours, les obus tombés dans la cour, il a fallu partir chez un oncle à 10 kilomètres de là, toujours dans la cariole (toujours bien soignées par les américains).

Maman et le petit domestique sont partis à notre maison, là le jeune homme est tué par une grenade incendiaire, maman brûlée à la tête et aux mains, direction l’hôpital militaire à quelques kilomètres.

Maman a gardé des séquelles aux mains.

J’étais restée dans la famille et au bout de quelques semaines retour à la maison.

J’avais du mail à me déplacer et en juillet 1945, j’ai été opérée à l’hôpital de Cherbourg, on m’a retiré un éclat d’obus de 5 cms environ. Et encore tant d’années après je ne peux pas m’agenouiller.

Mon père était enterré dans le jardin et l’inhumation a eu lieu au mois d’août.

En juin 1945, nous avons quitté la ferme pour venir à Cherbourg, maman a pris un commerce et j’ai pris des cours de sténodactylo, j’ai travaillé et je me suis mariée.

Voila, Monsieur, le récit de cette triste période.

Avec mes remerciements, recevez, Monsieur, mes salutations.

Jeanne Schuh

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