Ce 8 mars 2020, nous le dédions également à cette grande Dame:

SIMONE WEIL

Ce texte a été proposé à des élèves de troisième.

Témoignage d’une déportée

Simone Veil (1927-2017) est arrêtée par la Gestapo à Nice en mars 1944, avec sa mère et sa soeur. Elles sont conduites au camp de transit de Drancy en région parisienne et déportées ensemble en avril 1944.

« Le 13 avril 1944, nous avons été embarquées à cinq heures du matin, pour une nouvelle étape dans cette descente aux enfers qui semblait sans fin. Des autobus nous ont conduits à la gare de Bobigny, où l’on nous a fait monter dans des wagons à bestiaux formant un convoi aussitôt parti vers l’Est. […] Nous étions effroyablement serrés, une soixantaine d’hommes, de femmes, d’enfants, de personnes âgées, mais pas de malades. Tout le monde se poussait pour gagner sa place. […] Le voyage a duré deux jours et demi : du 13 avril à l’aube au 15 au soir à Auschwitz-Birkenau*. C’est une des dates que je n’oublierai jamais, avec celle du 18 janvier 1945, jour où nous avons quitté Auschwitz et celle du retour en France, le 23 mai 1945. Ces dates demeurent attachées à mon être le plus profond, comme le tatouage du numéro 78651 sur la peau de mon bras gauche. […]

Plus tard le soir de l’arrivée au camp, dans un baraquement surveillé par des kapos*

Celles qui avaient été séparées de leurs proches commençaient à s’inquiéter, se demandant où étaient passés leurs parents ou leurs enfants. […] Les kapos montraient par la fenêtre la cheminée des crématoires et la fumée qui s’en échappait. Nous ne comprenions pas, nous ne pouvions pas comprendre. […] Une kapo qui se tenait dans un coin de la pièce se mettait à crier ou menaçait certaines d’entre nous de son fouet. […] Puis les kapos nous ont fait lever et mettre en rang par ordre alphabétique et nous sommes passées l’une après l’autre devant des déportés qui nous ont tatouées. […] Ensuite nous sommes passées au sauna. Les Allemands étaient obsédés par les microbes […] la folie de la pureté les hantait. […] Peu leur importait que par la suite, celles d’entre nous qui ne mourraient pas à la tâche survivent dans la vermine et les conditions d’hygiène épouvantables. … Au printemps 1944, les autorités du camp avaient décidé de prolonger la rampe de débarquement des convois pour la rapprocher des chambres à gaz. […]Nous nous faisions à l’effroyable ambiance qui régnait dans le camp, la pestilence des corps brûlés, la fumée qui obscurcissait le ciel, la boue partout, l’humidité pénétrante des marais. […] A partir de début mai, les trains chargés de déportés hongrois se sont succédé de jour comme de nuit, remplis d’hommes, de femmes, d’enfants et de vieillards. […] Une épouvantable tristesse m’étreignait en voyant, éparpillés au sol, les vêtements des personnes qui venaient d’être gazées, »

Source : Extraits de l’ouvrage Une jeunesse au temps de la Shoah, écrit par Simone Veil, 2017.

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