LE MASSACRE D’ASCQ 1

Des allemands détachés du Kommando 908 de Lille, ont établi leur cantonnement près de la gared’ASCQ.

Nuit du 1er au 2 Avril 1944 : un bataillon blindé, la 12 éme Panzerdivision SS Hitlerjugend  (jeunesse hitlèrienne) arrive par le train en gare d’Ascq. Ce bataillon est composé de jeunes recrues et de sous-officiers SS   partant en Normandie renforcer la défense des côtes normandes. Il est équipé d’auto mitrailleuses et de chars. La 1ére compagnie est commandée par le Lieutenant Walter HAUCK2, la 3 éme par le sous-lieutenant HAUER qui accompagnent 400 hommes et 60 véhicules. Ce train suivait de près l’express Lille-Bruxelles pour éviter les sabotages.

Il est 22 h 45, une grosse explosion la locomotive s’arrête au poste d’aiguillage. Trois wagons transportant des véhicules ont déraillé et la locomotive n’a que de faibles dégâts. C’est le 3 éme sabotage du groupe « la voix du nord », mais en fait ils attendaient un train de marchandises. Ils sont une dizaine de résistants encadrés par Paul DELACLUSE agissant sur ordre du BCRA de Londres que dirige le Colonel PASSY.

Dégâts insignifiants aux véhicules, aucun blessé allemand. Le mécanicien belge DASCOTTE remet la locomotive en état, la troupe allemande est calme sauf le sous-lieutenant HAUER furibond. Mais au moment de l’explosion, ces soldats, SS et gradés divers sont sous l’emprise d’alcool et passablement ivres.

Une demi-heure après, ordres, coups de sifflets, tirs de mitraillettes. Les SS se rassemblent au passage à niveau. Ils ont ordre, de HAUER, de réunir les hommes du village âgés de 17 à 50 ans et de les amener près du train.

Le lieutenant HAUCK, vétéran de Stalingrad où il a été blessé obéi aux instructions, à savoir : riposter vigoureusement de suite. Il ordonne la fouille des maisons et la rafle de tous les hommes. Des résistants sont arrêtés, jugés par un tribunal allemand et fusillés au fort de SECLIN.

Fouille des maisons, quelques hommes ne sont pas inquiétés, les jeunes ont fuient. Certains sont abattus sans raison, notamment près du presbytère, dont 2 abbés.

Un groupe d’hommes et femmes est enfermé dans le poste d’aiguillage, puis emmenés avec d’autres en file indienne jusqu’au train. Des otages sont frappés par les SS hilares. Le garde barrière LAUTEY est abattu à bout portant.

Quelques hommes sont fusillés. Les femmes sont ensuite libérées. Le reste des hommes est mis dans un wagon où les bourreaux s’en saisissent : 15 seront exécutés, quelques-uns  survivront.

Les SS se dirigent vers la gare, où même les employés allemands de la Reichsbahn se sauvent à leur vue. Le chef de gare Victor GARRE et son aide Elie DEBACHE sont sauvagement battus et exécutés à la mitraillette.

Ces SS décidant alors d’une exécution collective alignent les hommes dans un champ proche de la gare face au train. Ils sont abattus : 50 environ, par petits groupes.

L’adjudant JURA recherche les responsables de l’attentat. Il se rend à la mairie. Mr DELEBART maire de la commune est emmené sur le lieu d’exécution mais arrivé sur place des cris, des bruits de moteur, de sifflets, retentissent. Quatre ou cinq minutes à rester les bras levés attendant l’acte suprême c’est éprouvant. Puis stupeur on nous ordonne de rentrer chez nous.

 Un adjudant de la feldgendarmerie enlèvera Maurice VANDENBUSSCHE aux nazis et le protégera dans son cantonnement. Le jeune André SABIN, 15 ans, est envoyé par les allemands du bataillon 908 chercher un médecin, cela lui sauvera la vie.

Dés 23 h le 1 er Avril la gare de Lille et la gendarmerie sont averties du sabotage. Elie DERACHE téléphone pour signaler la fusillade et la blessure du chef de gare. Toutes les autorités sont alertées pour mettre fin à cette situation. La gendarmerie de Roubaix enverra des renforts.

Les allemands de la 908 Wehrmacht avertissent leurs supérieurs à Lille qui, après s’être renseignés, envoient la Feldgendarmerie à ASCQ avec à sa tête le Lieutenant FRICKE qui intimera aux SS d’arrêter leur action.

Les otages alignés prêts à être exécuter reçoivent l’ordre d’un SS, furieux de cet ordre, de rentrer chez eux.

A 3 heures le calme règne de nouveau à ASCQ.

En plus des exécutions, violence sur quelques personnes, tirage de cheveux sur les femmes. Des jeunes filles et des femmes seront obligées d’assister aux exécutions puis repartiront chez elles. Pillage en règle : linge, vivres, tiroirs caisse, bijoux, cigarettes etc. cadavres détroussés par les SS.

Aucune réaction du gouvernement français.

Le général allemand BERTRANT justifie ces massacres par le fait que le convoi a été attaqué, alors qu’il n’y a eu que des dégâts matériels mineurs et aucun allemand blessé.

Les journaux refusent en grande partie de publier un communiqué allemand sur cette tragédie.

Le 5 Avril ont lieu les funérailles, 25 000 personnes sont présentes. Le cardinal LIENART, malgré l’interdiction, prononcera un discours où il exprimera sa vive gratitude à tous ces morts.

Les SS sont félicités par leur hiérarchie.

Le 15 Avril à la BBC, Maurice SCHUMANN évoque ces massacres, mais toujours pas de réaction de l’Etat français, ni de PETAIN.

Le procès du 2 Août 1949 à Lille verra les 8 inculpés (recherchés et connus depuis 1946) présents condamnés à mort, et un seul aux travaux forcés.

Le 20 juillet 1955 René COTY commuera les peines de mort en travaux forcés à perpétuité pour Walter HAUCK, 20 ans pour J RASMUSSEN et 10 ans de travaux forcés pour les 6 autres, avec remise de peine ; ils seront libérés en 1957.

Le sous-officier SS Karl MÜNDER a fait l’objet d’une nouvelle plainte après sa condamnation par contumace, il ne sera pas poursuivi pour des raisons juridiques entre états, car une personne ne peut être jugée 2 fois dans 2 pays différents (accords de Schengen).

 En 2018 lors d’une interview, il dit toujours ne rien regretter.

En 1949 un tribunal français condamne 17 SS mais, au procès il manque 7 inculpés dont Karl MÜNDER qui vit à Nordstemmen, près de Hanovre. En 2016 des policiers français et un procureur perquisitionnent chez lui (il a gardé reliques de guerre, photos de ses idoles nazies) et l’interroge, il reconnaît avoir été à ASCQ mais nie toute participation aux massacres.

Alexandre DELEZENNE petit fils de Pierre BRIET, le plus âgé des fusillés a saisi la justice allemande qui en Novembre 2014 puis en 2016 viendra enquêter à ASCQ.

Deux sœurs Marguerite Marie et Jacqueline Béghin, fille de Louis massacré à ASCQ ont saisi le parquet de Celle en Allemagne.

Le parquet de DORTMUND est compétent dans le traitement des crimes nazis. Il a retrouvé Karl MÜNDER.  

 

Notes : 1°) le 75 éme anniversaire a été célébré ces 13 et 14 Avril 2019.

 2°) Walter HAUK est aussi responsable du massacre du village de Lestovice en Tchécoslovaquie en Mai 1945.

Sources : diverses web et documents.

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