Henri BORLANT, seul enfant juif rescapé sur 6000.

Ce dernier 3 décembre 2024, ce médecin, seul rescapé des 6 000 enfants juifs de France âgés de moins de 16 ans, déportés à Auschwitz en 1942 est décédé, il avait 98 ans.
Le 5 juin 1927, le petit Hirsch, vient s’ajouter aux 3 enfants de sa famille, il est donc le 4 ème et 6 autres l’imiteront ensuite (en tout 5 garçons, 5 filles). Son frère aîné Léon, l’aîné de la famille francise son prénom qui devient Henri.
Les parents, mariés en 1916, juifs non pratiquants : le père Aron, originaire d’Ukraine (Odessa), né le 1er avril 1888 à Novo-Majolik est tailleur ; la mère, Rachel Beznos, naturalisée Française, rencontrée à Paris a fui le régime tsariste de la Russie et pense que la France après l’affaire Dreyfus est le pays où il fait bon se réfugier. Le couple s’installe à Paris dans un modeste mais accueillant logement, du 13 ème. Le père de Rachel a même déserté l’armée du Tsar.
Août 1939, l’ordre est donné d’évacuer Paris vers le Maine et Loire dans le village de Saint-Lambert-du-Lattay, 25 km au sud d’Angers. La famille part, sauf le père, qui les rejoindra en juin 1940. La mère est enceinte. Les enfants vont à l’école catholique du village. Les enfants seront par sécurité baptisés, pour éviter de possibles ennuis. Son père le déclare quand même comme juif à la préfecture, comme il est prescrit.


Henri, son certificat d’études obtenu veut devenir prêtre, impossible car juif. Et c’est dans le garage du village qu’il se formera. Content de cette aubaine, la vie lui est agréable jusqu’au jour du 15 juillet 1942, la Wehrmacht vient de s’installer à Angers la veille.
C’est cruel, car une rafle des juifs de 15 à 50 ans les prend : lui, son frère Bernard (17 ans), sa sœur Denise (21 ans) et sa mère (42) ans. Ils sont incarcérés dans le grand séminaire d’Angers pendant 5 jours. Mais la mère est remplacée par le père, pour une question d’âge.
Jetés, le mot n’est pas trop fort, dans un wagon à bestiaux ils partent par le convoi n° 8 vers Birkenau le 20 juillet 1942, où ils arrivent après 3 épuisants jours de trajet. Henri a eu le temps d’écrire à sa mère « maman nous partons travailler en Ukraine », billet trouvé par un cheminot, l’ayant remis à Rachel, sa mère.
Accueil traditionnel : cris, chiens, des coups qui pleuvent, tête rasée, déshabillage hommes, femmes et enfants confondus, douche de désinfection et pour finir tatouage du n° matricule le 51055, sur le bras gauche. En rang sans bouger pendant des heures, un coup de feu parfois, c’est un homme qui vient d’être abattu sans raison. Des travaux inutiles seulement pour épuiser le détenu. Chaque être n’est plus qu’un banal numéro. Avec comme environnement la fumée et les cendres des fours crématoires, dont ils découvrent l’existence. On essaie d’avertir les nouveaux arrivants qui peinent à nous croire, et pourtant !
Ils sont parqués dans des baraquements, et ils réalisent un travail épuisant, sont peu nourris, 1 /2 litre de soupe le midi, 200 g de pain le soir. Malades de la dysenterie, du typhus et malgré tout, la vie continue : il faut tenter de survivre.
Henri ira de camps en camps pour finir à Ohrdruf (Thuringe) dépendant de Buchenwald, situé à 60 km., en Allemagne. Il y reste 4 mois puis ira 2 ans ½ à Auschwitz.
Il se cache parfois pour ne pas aller travailler, mais ne reçoit pas sa ration de nourriture. Un SS le désigne, car il parle allemand, avec un autre détenu juif polonais plus âgé, pour aller travailler à la cantine des SS, située à l’extérieur du camp. Il y restera 3 mois. Dans ce bâtiment la cuisine est séparée de la cantine par un couloir, ce sont 2 faits qu’il remarque. Et bonus ils ne participent pas à l’appel du soir, puisqu’ils sont chez les SS.
Un kapo SS hongrois, non nazi, devient leur complice. Ils échangent beaucoup d’idées d’évasion bien sûr. Ils projettent de s’enfuir en simulant leur raccompagnement sous la garde du SS et de son fusil mais quasiment impossible car trop de SS dans les parages.
Il faut trouver une autre solution, en attendant ils se cachent dans les caves de la cantine. Et dans la nuit du 3 au 4 avril 1945, ils s’enfuient avec le SS hongrois. Ils se réfugient chez un boucher allemand, dont ils ont eu connaissance par un de ses ouvriers prisonniers français. Ce boucher est un anti-nazi, peut-être l’auriez-vous deviné.
Ils troquent leurs vêtements distinctifs contre des habits courants. Les troupes US arrivent le lendemain. Ils vont à leur rencontre et leur font un récit des horreurs vécues, puis les emmènent sur place, afin qu’ils se rendent compte de la véracité de leurs dires.
Libres, ils prennent un véhicule allemand le 13 avril pour rejoindre la France mais les autorités US les en empêchent. C’est à un train auquel ils ont droit. Les voilà partis, ils arrivent en gare de Montigny-les-Metz le 16 avril. Ils sont soumis à des contrôles mais non pas de papiers. Henri, 18 ans, raconte son parcours, personne ne le croit. Mais d’autres prisonniers français corroborent ses dires.
Il peut partir vers Paris avec son compagnon ouvrier boucher. Ce dernier l’accueille chez lui, en attendant de retrouver si possible sa famille restante et leur logement. Sa mère retrouvée, il prend un taxi et se fait conduire à son ancienne demeure au 159 rue du Châtelet dans le 13 ème.
Il apprend par sa mère qu’elle avait dû quitter son village refuge du Maine et Loire, avec ses 5 enfants, parce qu’un gendarme du village lui avait conseillé lors de l’occupation ennemie de la zone sud. Une période difficile car sans papiers, sans argent.
Ses grands-parents maternels ont été déportés 1 an après lui.
Revenu à la vie normale, il va reprendre des études. Un copain médecin déporté, ayant détecté son intelligence lui conseille de passer le BAC. Oui, mais comment faire il n’a pas le niveau. Il postule à une entrée en 6 ème dans plusieurs établissements, mais c’est un refus à chaque fois. Cet ami trouve une solution, il connaît un Cours Complémentaire dont le directeur est un ancien collaborateur « sous surveillance » et qui ne pourra qu’accepter.
Il est admis, mais demande à intégrer directement la 3 ème, il a 18 ans. Après quelques tergiversations on l’y autorise. Ce sera beaucoup de travail, énormément de travail. Très volontaire, pugnace il prépare le BAC en même temps mais bien sûr échoue.
Entre dans un nouveau lycée, le Saint-Louis, même détermination, il est en classe de 1 ère, rate son 1er BAC mais le repasse et l’obtient en septembre, le 2 ème sera acquis en février.
Problème : il a contracté une tuberculose pulmonaire, comme beaucoup de détenus. Il part se soigner dans un sanatorium allemand en Forêt Noire, pendant 10 mois. Puis s’inscrit à la faculté de Strasbourg en février mars pour passer son PCB, entrée en fac de médecine, obtenu en juillet. Médecin il est donc devenu. Il épouse Hella Host une jeune allemande, non-juive et anti-nazie. Cette dernière a été jeune fille au pair dans une famille juive de Grande-Bretagne. On l’a mise au courant de ce que subissait cette population. Et a donc décidé de ne plus retourner en Allemagne.
En 1992 une voisine de palier recueille des témoignages. Henri va se joindre au groupe, il est seul survivant et ne peut donc se taire. Jusqu’à lors il n’avait pas éprouvé le besoin de raconter. Et on lui demande, il veut donc témoigner car d’autres crimes de ce genre se font jour, l’actualité est là pour en révéler l’existence.
Il va ainsi se produire devant des élèves, des enseignants lors de séminaires. Portera ses témoignages en prison, en fac, à l’étranger.


Un jour, parait-il, un garçon d’une classe de 3ème après avoir écouté son récit lui griffonne sur un papier « merci d’être revenu », 3 mots de grande signification. Il en sera très touché, à tel point qu’il en fera le titre de son livre.

Son message : défendre la démocratie.
Un vrai bonheur d’être libre et de pouvoir parler……librement
Il dit encore : la Shoah n’a pas vacciné le monde.

Nb : il est retourné voir la boucherie, devenue magasin de chaussures. Une dame de cette maison lui a confirmé la mort de ce boucher et a dit connaitre sa fille, qu’il est allé voir. Il a aussi retrouvé son copain d’évasion, resté en Allemagne et devenu un riche industriel.
Sources : divers sites internet

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