Henri MOSSON rescapé du camp de Struthof (Alsace)

Condamné à mort le 29 juin 1943, il avait 19 ans, la vie s’ouvrait devant lui.
Pourquoi ? Eh bien Henri né le 5 janvier 1924, à Boux sous Salmaise (Côte d’or), s’engage à 17 ans dans un maquis FTP dijonnais « Morane »(1) de Bligny le Sec près de Turcey. Il est : alias « Raoul Desbois ».
Il est arrêté en mai 1943, et condamné à mort par un tribunal militaire de Dijon pour actes de résistance, détention d’armes entre autres. Il est conduit dans les locaux de la gestapo à Dijon, 9 rue du Dr Chaussier, où il sera interrogé, torturé sans révéler quoique ce soit.
La sentence ne sera pas exécutée, il est envoyé au n° 78 rue du Cherche Midi, à la prison éponyme, à Paris (6 ème), réservoir d’otages (2) de la Wehrmacht.
Puis il est dirigé vers le camp de Natzweller-Struthof via la gare de Rothau (Bas-Rhin), proche du camp où il arrive avec d’autres prisonniers, le 26 novembre 1943.

 Entrée du camp (photo AFP P.Hertzog)

Ce camp ouvert en mai 1941 est destiné à l’accueil de détenus « N.N », Nacht und Nebel. Environ 50 000 déportés y transiteront mais 17 000, dont 3 000 français y périront. En août 1943, l’horreur : 86 juifs seront gazés. Leurs squelettes récupérés pour des études ultérieures.

une des chambres à gaz (photo AFP S.Bozon=

    une des chambres à gaz. (Photo by Sébastien BOZON / AFP)


On les invite, le mot est un peu fort, à monter dans des camions, pour rejoindre le camp situé à 8 km. Pas assez de places, les détenus restants iront à pied. Il fait froid, à 800 m, un homme en décédera sur le trajet.
Ouf enfin le camp, sa découverte ! Accueil stupéfiant par son directeur, mais bien dans la logique de l’occupant : « Vous êtes des bandits, vous êtes entrés par la porte et vous sortirez par la cheminée ». Les détenus s’interrogent ?
L’ordre de déshabillage est donné, ce qui est fait, suivi par la tonte des cheveux. Puis, oh ! miracle une douche chaude. Pas vraiment miracle car ce sont les fours crématoires qui assurent cette fonction. Enfin les corps sont désinfectés.
Henri se voit attribuer le n° 6290, à coudre sur les vêtements ainsi que les lettres « NN », le n° devant, les lettres NN (3) dans le dos. Affublé aussi d’un triangle rouge (4) à coudre aussi On l’affecte au tri et à la désinfection des vêtements, tâche pas trop pénible physiquement.
Pas doué pour la couture, il coud son n° de travers, un garde SS lui administre une retentissante gifle qui fait réagir Henri, qui s’écrie « Warum » (pourquoi ?) révélant ainsi sa connaissance de la langue.
La nourriture, si on peut l’appeler ainsi, est infecte : soupe de choux-raves ou d’orties. Très rare, le morceau de pain., pourtant prévu. Des idées d’évasion, oui, mais peu car si l’on est repris c’est la pendaison. Un seul y parviendra, en rejoignant sa contrée du Doubs à bicyclette.
Henri Mosson supporte le froid ou la chaleur (climat continental). Il survit malgré tout, aidé notamment par sa connaissance de la langue allemande qui lui permettra de servir parfois d’interprète. Ce qui ne l’empêchera pas de recevoir des coups de pelle le blessant au bras et l’envoyant au « revier  (5) ».
Fin août 1944 : les alliés, approchant, les nazis évacuent le camp, après avoir transféré les détenus dans d’autres camps comme Cochem, Erzingen et pour finir Munich-Allach (banlieue de Munich), camp externe de Dachau.
Et puis un matin, un étrange silence règne dans le camp, atmosphère de printemps, non, bien mieux : les gardiens allemands sont partis. Le camp est libéré le 30 avril 1945 par les troupes US.


Henri retrouve sa Bourgogne, très amaigri 38 kg au lieu des 60 et quelques à son départ.
En 1979, une vie passionnante l’attend, il devient contrôleur technique des voitures de formule 1, celle de Prost, de Senna etc. Ce qui fera de lui un grand voyageur, au gré des courses de F1.
Et surtout ayant arrêté toute activité, il devient passeur de mémoire dans les écoles, collèges et lycées, de la région.

                               Henri MOSSON lors d’un témoignage

Tout en restant proche de sa famille : 4 enfants, 6 petits-enfants et 10 arrière- petits-enfants.
Rescapé de ce camp il l’est aussi à la suite d’un grave accident de voiture en 1992.
Il œuvre au sein de l’ONAC.vG en aidant à la constitution de dossiers, et est également membre du jury du Concours National de la Résistance et de la Déportation
Distinctions. Chevalier de la légion d’Honneur en 1964.
Officier dans le même ordre le 25 janvier dernier.
Commandeur dans l’Ordre des Palmes Académiques, le 28 février 2023 au collège Boris Vian de TALANT (Côte d’Or). Suivi de la projection d’un film « Henri Mosson, alias Paul Desbois NN 6290 », de Jean-Marc Bordet. Autre film : « Au plus profond de la nuit ».

Henri MOSSON décoré (photo AMOPA B.Manzoni)

Et enfin, le 23 mai dernier, lors de la cérémonie du 80 ème anniversaire de la découverte du camp, il a remis un flambeau à un « jeune » pour que ce dernier le transmette au Président de la République. Ce dernier rallumant ainsi la flamme du souvenir des déportés du Struthof. Son fils Gérard assistait à cette cérémonie.

Notes :
1°) créé par Raymond Wéité, recherché par la gestapo.
2°) en cas d’attentats sur leurs troupes, un nombre d’otages étaient exécutés.
3°) NN « Nacht und Nebel » Nuit et Brouillard : décret de J.Keitel en décembre 1941, déportation de tous les opposants au régime.
4°) marque du déporté politique, communiste en général, siglé de la lettre F ou D (oui des prisonniers politiques autochtones).
5°) « revir » pour les français, nom de l’infirmerie du camp, « quartier des malades » pour les allemands.

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Sources : divers sites internet.

 

 

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